Basculement du centre de gravité du catholicisme

Chaque année, en octobre, est publié l’annuaire statistique de l’Eglise catholique qui prend en compte les données compilées au 31 décembre de l’année précédente. On y apprend que depuis 2018, il y a 16 millions de catholiques en plus dans le monde. Une croissance régulière.

Nous disposons de l’édition de 2019 : « Il s’agit d’un relevé exécuté à une échelle mondiale. Il relève donc nécessairement la diversité parfois considérable des situations dans lesquelles se trouvent […] les circonscriptions ecclésiastiques des différents pays. » (Préface de l’édition de 2019). Ces dernières, « avec lesquelles il est possible d’établir un échange régulier d’informations », étaient au nombre de 3.026 sur un total de 3.173 à la fin de 2019.

On comptait 1 milliard et 345 millions de catholiques au 31 décembre 2019, précisent encore les chiffres, soit 17,7% de la population mondiale – ce qui reste assez stable (17,5% en 2011). Les chiffres augmentent en Afrique (+3,4%), en Asie (+1,3%), en Océanie (+1,1%), en Amérique (+0,84%) mais baissent légèrement en Europe, précise le site Vatican News.

Un autre critère d’évaluation souvent repris concerne le nombre des prêtres : au 31 décembre 2019, celui-ci s’élevait, dans le monde, à 414 336 (282 136 prêtres diocésains et 132 200 « religieux prêtres »). Il augmente en Afrique et en Asie (respectivement +3,45% et +2,91%) alors qu’il diminue en Europe et en Amérique (respectivement -1,5% et environ -0,5%). On précise même que l’Europe connaît une « diminution consistante ».

Il est toujours intéressant de comparer ces annuaires qui rendent compte des mutations profondes que vit l’Eglise. A propos de l’annuaire de 2001, un commentaire précisait : « Si l’on considère la distribution des prêtres à travers le monde, on constate une forte présence de prêtres européens (10% sont asiatiques, 6,6% africains et 1,2% d’Océanie) ». En 2019, ils représentent presque 41% du total des prêtres diocésains ou religieux (environ 29% des Amériques, 17% d’Asie, 12% d’Afrique, 1% pour l’Océanie).

Les statistiques nous informent encore que le continent qui compte le plus grand nombre de séminaristes est l’Asie (33 821), suivi de l’Afrique (32 721), de l’Amérique (30 664), de l’Europe (15 888) et de l’Océanie (964). Enfin « la population des diacres permanents continue d’afficher une dynamique d’évolution significative et encourageante » précise la même source. Ils sont 46 813 en décembre 2019.

Le nombre de religieux et de religieuses est, de son côté, en baisse. L’Afrique est le continent qui connaît la plus forte augmentation. Dans l’annuaire statique sont encore évoqués les missionnaires laïcs (410 440) et les catéchistes (3 074 034). Alors que le nombre des premiers augmente, le second diminue.

Comment réagir face à ces chiffres?

On en retient parfois un cri de victoire : « La population catholique augmente dans le monde ! » D’autres sont exaspérés et le manifestent sur les réseaux sociaux : « Ces statistiques où tout va bien commencent largement à m’énerver ». Les chiffres rendent compte de tendances mais disent-ils tout de la réalité ? S’il peut être tentant de poser un jugement à partir de chiffres, ils nous invitent à être attentifs à la réalité pour affiner notre perception. A ce niveau le sous-titre d’un ouvrage récent de sociologie – La religion dans la France contemporaine (P. Portier et J.-P. Willaime, Armand Colin, 2021) – est significatif : « Entre sécularisation et recomposition ».

Les enquêtes quantitatives représentent une approche de la réalité. Parce qu’il s’agit de chiffres, elles semblent incontestables, mais elles ne sont pas un jugement. Elles nous renseignent sur la réalité et nous invitent à nous poser des questions, à relever les défis de notre monde. Pour autant le fond reste caché.

La vie est plus riche et plus complexe ! La foi reste un appel que l’on peut difficilement encadrer par une série de données statistiques. Elle permet la rencontre et l’ouverture, non l’enfermement dans des mondes clos et déterminés. Comment pouvons-nous y découvrir les « signes des temps » qui nous disent que Dieu est présent dans notre histoire humaine où il se laisse chercher et contempler ?

Père Elie Delplace

Référent pastoral de la Cellule Accueil (SNMM)

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