Marathon de prière : Au sanctuaire de Notre-Dame du Liban, prière pour les consacrés le 29 mai
Le Père Tanios Bteich, 33 ans, Curé de la mission maronite de Toulouse, a été ordonné pour la France en 2019, par Son Excellence Mgr Maroun Nasser Gemayel, évêque des maronites en France et visiteur apostolique pour l’Europe occidentale et septentrionale. Interview à l’occasion de la chaîne de prière à Marie, lancée par le pape François dans 30 sanctuaires dans le monde pour invoquer la fin de la pandémie, et qui fera prochainement étape à Notre-Dame du Liban à Harissa.
Quelle est l’importance du sanctuaire Notre-Dame du Liban ?
Ce sanctuaire appartient au Patriarcat maronite mais il est animé par la congrégation des missionnaires maronites libanais. Il se situe sur le Mont Liban, sur la colline « Harissa » qui domine la mer Méditerranée. La statue monumentale de Notre-Dame du Liban protège le Liban car mon pays lui est consacré. C’est un lieu de prière et de piété populaire important, avec des pèlerinages et des processions. Il a été construit cinquante ans après la promulgation du dogme de l’Immaculée Conception par le pape Pie IX, le 8 décembre 1854.
Le sanctuaire Notre-Dame du Liban est aussi fréquenté par des Musulmans, venus d’Iran, d’Arabie Saoudite, de Dubaï, et d’autres pays arabes, car ils tiennent à la Vierge Marie. C’est une Mère qui rassemble tous ses enfants. La statue de Notre-Dame, qui domine une chapelle, est accessible par un escalier en colimaçon de 104 marches. Les pèlerins montent au sommet pieds nus, en signe de pénitence.
La Vierge, qui mesure 8,5 m de haut et 5 m de diamètre, a été offerte par la France. Elle tend ses bras vers la capitale Beyrouth, comme si elle disait : « Venez à moi et rassasiez-vous de mes dons ». La Vierge est pour tous.
Ce pays de 10.452 km2, peuplé par 4 millions d’habitants, reçoit plus de 2 millions de réfugiés. La crise économique provoque de nombreuses difficultés. La faim s’est fait sentir pour la première fois récemment. Même pendant la guerre, le pays n’avait pas connu de famine. Je crois que vivre au Liban est un miracle. Nous préparons un colloque avec l’Institut catholique de Toulouse sur ce thème. C’est un lieu habité par l’Esprit Saint et par Dieu. Sinon il aurait été détruit il y a des années. Il tient grâce à cette force qui vient de l’au-delà ! On dit souvent du Liban qu’il n’est qu’un petit point sur le globe terrestre. Nous tenons au Christ, passé par Tyr et Sidon. Le Mont Liban est cité 365 fois dans la Bible !
Pourquoi prier au Liban pour les consacrés le 29 mai ?
Le 29 mai, on priera le chapelet à l’intention des personnes consacrées. L’Eglise catholique traverse une crise des vocations. Le Liban est un petit pays mais il compte beaucoup de couvents, d’églises et de prêtres. On y observe aujourd’hui une baisse des vocations religieuses féminines.
Le Liban porte un message de paix. Le pape Jean-Paul II n’a-t-il pas dit que Liban est un plus qu’un pays, c’est un « message », en raison de la fraternité entre les Chrétiens et les Musulmans ? C’est dans ce sanctuaire marial qu’il a signé l’exhortation apostolique « Pour une espérance nouvelle pour le Liban », le 10 mai 1997.
A la pandémie et la crise économique, s’est ajoutée l’explosion apocalyptique du 4 août 2020 à Beyrouth. Elle a ravagé non seulement les immeubles mais aussi l’être même du Libanais. Cela fait longtemps que notre Orient souffre. Le pape François l’a exprimé lors de son voyage en Irak : il tient à ce que les Chrétiens d’Orient ne quittent pas leur Orient. Là-bas, dans un même immeuble vivent des Chrétiens, des Musulmans, des Druzes… On essaie de vivre la fraternité et la solidarité. Après l’explosion, les chefs religieux se sont unis pour aider tous les citoyens. Le jour de l’Annonciation, le 25 mars, est férié pour tous. Le dialogue interreligieux est très présent.
Pourquoi avez-vous souhaité être missionnaire en France ?
J’ai d’abord voulu suivre le Christ ! Mais Mgr Gemayel m’a interpellé : « Veux-tu rester au Liban où les vocations sont nombreuses ou suivre le Christ là où des communautés orientales n’ont pas de berger pour vivre avec elles ? » Je dis toujours que je ne suis pas un distributeur de sacrements ! Je suis en France pour vivre avec mon peuple. L’eucharistie du dimanche vient couronner ma semaine mais il y a toute une vie avant le dimanche ! Je suis ici pour ces jeunes qui ont quitté le Liban pour venir étudier en France, pour ces Irakiens et ces Syriens obligés de fuir leur pays pour ne pas renier le Christ. C’est mon but et ma mission : Je suis serviteur.
Mgr Gemayel et Mgr Robert Le Gall, archevêque de Toulouse, se sont mis d’accord. Je suis arrivé en France deux semaines après mon ordination, nommé curé d’une nouvelle paroisse à Toulouse. Auparavant, un prêtre visiteur de Bordeaux se rendait ici une fois par mois – au mieux. Ca n’a pas été facile : nouvelles structures, nouveaux rites, nouvelles manières de penser…
La France accueille 80.000 Maronites et on compte entre 120 et 140 jeunes chrétiens d’Orient à Toulouse. Nous sommes très attachés à la famille. Au Liban, les jeunes ne quittent leurs parents que pour se marier. Ici la jeunesse peut vite être désorientée même si elle est orientale (rires), s’éloigner de la religion et de la tradition. Je suis à leurs côtés pour les intégrer dans les activités paroissiales (veillée de Noël, retraite spirituelle, soirées franco-orientales), pour que la paroisse soit pour eux comme une famille. Comme eux, je suis jeune et loin de ma famille. J’aimerais être à l’exemple du pape François : aller aux périphéries, vivre la rencontre. On m’a confié des âmes. Est-ce que je vis ce que je dis ? C’est ma grande question. Je cherche à être authentique vis-à-vis de moi-même. La prêtrise est un cheminement.
Propos recueillis par Claire Rocher (SNMM)
"L’Église maronite est bien catholique !" "Elle est la seule Église orientale qui n’ait jamais quitté Rome, poursuit le Père Tanios. Église autocéphale, elle a son propre patriarche, Son Éminence Card. Bechara Boutros Raï, et sa liturgie propre – même si très latinisée - mais elle est bien catholique ! Elle est marquée par la figure de Saint Maroun, qui vivait en Syrie, dans l’abandon et la simplicité. Cette Église est toujours inspirée par l’exemple des moines ermites de la vallée sainte de Qadisha".