Diversité des prêtres au service d’un diocèse
L’Union Apostolique du Clergé (UAC) est une fraternité de prêtres diocésains. L’objectif est de renforcer l’entraide entre prêtres. La revue du mouvement s’intitule : Prêtres diocésains, mensuel bien connu du clergé.
En novembre 2018, l’UAC a consacré un colloque à la question de la « diversité des prêtres au service d’un diocèse ». Les textes des interventions faites à cette occasion viennent d’être publiés dans un numéro spécial de Prêtres diocésains. Lecture passionnante.
Le point de départ est le constat d’une sorte de délitement de l’unité du presbyterium. Le presbyterium diocésain se fracture : entre prêtres originaires du diocèse et religieux/fidei donum qui viennent « d’ailleurs », comme on dit des prêtres venus d’ailleurs, euphémisme pour désigner des étrangers. Autre groupe très identifié dans les presbyteriums : les prêtres appartenant à des communautés, Emmanuel, Chemin neuf, Communauté de St Martin, etc… Dans beaucoup de diocèses, nous en sommes là : le presbyterium se répartit en trois groupes de même importance : les « locaux », les fidei donum (étrangers), les prêtres de communautés parfois appelées nouvelles… quelle unité ?
Le mérite de l’UAC et de son colloque est de s’attaquer à ces questions, de les nommer. Sans les passer sous silence. Cela concerne quasiment tous les diocèses de France, et non pas seulement les « plus pauvres » (sous-entendu en prêtres). Dans tel diocèse, l’évêque a même nommé un étranger fidei donum comme vicaire général. Selon la tradition française, l’évêque est lui aussi « venu d’ailleurs » (de France pour le moment), alors qui incarnera le clergé local ?
Les articles de cette revue posent le problème, même si les statistiques de l’Église de France sont très lacunaires. Quelques articles replacent dans l’histoire le ministère et le mode de vie des prêtres. Cela situe historiquement mais ne relativise en rien les défis actuels.
Deux évêques ont le courage de parler sans langue de bois de la situation de leur diocèse respectif : Nevers et Aire et Dax. Du nombre de prêtres, en particulier ceux qui ont moins de 75 ans. De la pluralisation de leur presbyterium. Des chiffres ridiculement bas pour des diocèses ruraux. De l’absence d’unité du clergé. Jadis, ce sont d’anciens copains de lycée et collège qui devenaient prêtres. Ceux-ci se connaissaient. Aujourd’hui les vocations sont urbaines. Et pas toujours locales : des étudiants qui décident de rester dans la ville universitaire où ils ont fait leurs études. Finies les amitiés adolescentes qui soudaient le clergé. Alors quel avenir pour l’unité d’un presbyterium diocésain ?
La lecture du numéro de cette revue est passionnante et soulève plus de questions qu’elle n’en résout. On pourrait même ajouter de nouvelles questions : la fracture du presbyterium en trois groupes n’est-elle pas compliquée par un quatrième groupe : des jeunes prêtres qui s’affirment, partisans d’un christianisme attestataire, qui veut reconstruire l’Église de France après les « errements soixante-huitards » (qu’un certain clergé aurait acclimatés à l’intérieur de l’Église même, selon ces nouveaux croisés !). Des jeunes prêtres qui prennent leur distance avec la génération « socio-conciliaire », pour ne pas dire soixante-huitarde ? Une fracture générationnelle qui ajoute à la dispersion du presbyterium ?
Curieusement ce numéro de revue se termine sans conclusion, sans orientations proposées pour l’avenir, sans sortie de crise, sans scenario d’avenir. Dans cette situation, que faire ? On ne reviendra pas sur les mutations de notre temps : des vocations plus urbaines que rurales, la fin des amitiés de collèges/lycées qui soudaient les solidarités sacerdotales… alors faut-il enregistrer la fin de l’unité du presbyterium diocésain ? Peut-on envisager d’autres modes de gestion du clergé ? Autant de questions qui mériteraient d’être posées au niveau national, par la Conférence des Évêques ! Il faudrait pour cela apprendre à débattre, à se parler en vérité, à commencer par faire des statistiques pour parler en connaissance de cause.
Antoine Sondag,
août 2019