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Pourquoi collecter de l’argent pendant la célébration de l’eucharistie ?

Les questions simples sont parfois les plus redoutables. Ne pas s’abriter derrière des mots. Dire simplement ce qui est essentiel. Il en va ainsi de la quête, question qu’on ne pose plus tant la quête durant la messe parait évidente. Mais tout change, y compris la quête. Si on n’y prend pas garde, ce geste de la quête, ce rite ( ?), cette partie de la liturgie ( ?) peut être détourné par des considérations nouvelles ou inédites.

Pourquoi collecter de l’argent pendant la célébration de l’eucharistie ?

Pourquoi collecter de l’argent pendant la célébration de l’eucharistie ?

C’est que la quête a une pluralité de significations, comme c’est souvent le cas pour les rites. On peut et on doit y voir un geste liturgique. Si l’on considère la quête comme une technique de collecte de fonds, il faudra alors remarquer que c’est une technique bien archaïque et qu’il est grand temps de diversifier les canaux de collecte.

La diminution du nombre des pratiquants dominicaux, la multiplicité et la diversité des sollicitations pendant et en dehors de la liturgie dominicale, l’apparition d’autres moyens de paiement et d’autres raisons encore, font que les « bonnes vieilles quêtes du dimanche » ne rapportent plus assez. La législation fiscale qui permet de déduire 66% d’un don de ses impôts sur le revenu (pour la grosse moitié des Français qui a le bonheur de payer un impôt sur le revenu) rend le don anonyme contreproductif, puisqu’il faut obtenir un reçu fiscal afin de bénéficier de cette réduction d’impôt. Avec la réduction fiscale, il est possible de donner trois fois plus, sans que cela ne « coûte » plus au généreux donateur… Si on veut donner 10€ de sa poche, il est possible de donner 30€ puisqu’on obtiendra une réduction fiscale de 20€ (66% du don de 30€). Mais il faut un reçu fiscal.

Alors, la vieille quête du dimanche est-elle devenue obsolète ? Faut-il l’abandonner ? Si l’on a une approche « moderne » de collecteur de dons, faut-il constater que la quête est vieillotte et qu’il est grand temps de passer à des méthodes plus contemporaines de collecte de dons ? Virements bancaires, virements permanents, paiement par carte bancaire, utilisation de terminaux de paiement utilisant des cartes bancaires sans contact, etc ?

A cette problématique s’ajoute la question de la destination de la quête. Couvrir les besoins de l’Église ? Soutenir une « cause » spécifique ? Mais les besoins évoqués (faim dans le monde, soutenir telle catégorie de personnes handicapées, lutter contre le cancer, faire face aux besoins des personnes âgées et dépendantes…) exigent des budgets qui n’ont rien à voir avec l’addition des micro-dons de 2 ou 5 Euros ! Dès lors, à quoi servent vraiment les quêtes ? Faut-il les maintenir ?

Le sens de ce geste : le don d’argent au sein de la liturgie- est expliqué ci-dessous dans l’article signé par Bruno Mary, directeur du service national de la pastorale liturgique et sacramentelle. C’est le sens à privilégier.

Une approche de collecteur de fonds obtenus de la générosité du public (« fund raiser ») incite évidemment à utiliser des techniques plus diversifiées et plus rentables.

Destination des quêtes spéciales

Ce même type de raisonnement doit s’appliquer aux quêtes impérées et aux quêtes qui ont une destination précise différente de l’utilisation habituelle : subvenir aux besoins de l’Église.

Pourquoi organiser une quête pour le CCFD durant un dimanche de Carême : une quête rapporte entre un et deux millions d’Euros par dimanche. Alors que les autres techniques de collecte de fonds rapportent au CCFD plus de 40 millions d’euros chaque année. On peut faire le même raisonnement pour le Secours catholique, les OPM ou d’autres institutions qui bénéficient d’une quête avec un objet spécifique au cours de l’année…

Pour que le geste liturgique, avec le sens que lui donne B. Mary dans l’article ci-dessous, pour que ce geste soit compréhensible, il faut que la quête à destination spéciale soit vraiment la quête de la liturgie du jour, et non une quête à l’entrée de l’église, ou une seconde quête, ou encore une autre technique… c’est ce que rappellent les bonnes pratiques du guide juridique de la Conférence des évêques de France qui sont rappelées dans le document en pièce jointe. La destination de la quête spéciale doit être rappelée. Et cette destination doit être respectée.

Dans le domaine qui concerne plus spécifiquement la Mission universelle, on attire ici l’attention sur la quête du dimanche d’octobre, Journée Missionnaire Mondiale. Dans beaucoup de diocèses, la quête de l’Épiphanie est aussi consacrée aux Églises d’Afrique. Ces quêtes (et d’autres) rappellent au cœur de la liturgie que notre cœur et notre esprit doivent s’ouvrir aux dimensions de l’humanité entière. Cela n’empêche pas de soutenir des organisations qui financent des projets au service des Églises moins riches : OPM, Secours catholique, Œuvre d’Orient, CCFD-Terre solidaire… sans parler des organisations non-confessionnelles et dont beaucoup font un excellent travail.

Antoine Sondag,
février 2018

Bonnes pratiques financières

Pourquoi collecter de l’argent pendant la célébration de l’eucharistie ?

Sans doute à condition d’en retrouver le sens. La quête appartient au rassemblement eucharistique dominical. Les Écritures témoignent que les premiers chrétiens mettaient tout en commun (Ac 2, 42 et Ac 4, 32) et St Paul organise une quête pour l’Église de Jérusalem. (cf 2 Co 8 – 9). Il est inconcevable de vivre le geste de la fraction du pain, celui de la communion eucharistique sans vivre le partage au quotidien, venir en aide aux plus démunis de la communauté et d’ailleurs : ‘Si quelqu’un dit : ‘J’aime Dieu, alors qu’il a de la haine pour son frère, c’est un menteur. En effet, celui qui n’aime pas son frère qu’il voit, est incapable d’aimer Dieu, qu’il ne voit pas’ dit l’apôtre Jean (1 Jn 4, 20). Paul développe cette argument : ‘Que chacun donne comme il a décidé dans son cœur, sans regret et sans contrainte, car Dieu aime celui qui donne joyeusement. Et Dieu est assez puissant pour vous donner toute grâce en abondance, afin que vous ayez, en toute chose et toujours tout ce qu’il vous faut, et même que vous ayez en abondance de quoi faire toute sorte de bien.’ (2 Co 9, 7-8). Nous le voyons, il y a là un enjeu de foi, de cohérence et de crédibilité.

S’unir au Christ dans l’offrande du sacrifice

D’ailleurs, dans la célébration de la messe, quand se déroule la quête ? Elle commence après la prière universelle au moment de la présentation des dons. Il peut d’ailleurs arriver que les paniers de quête soient apportés en procession avec le pain et le vin. Dans la ‘Présentation Générale du Missel Romain’ (PGMR), la quête appartient aux offrandes (PGMR, 73, 140 : ‘Il est bien que la participation des fidèles se manifeste par l’offrande du pain et du vin pour la célébration de l’eucharistie, comme par d’autres dons destinés à subvenir aux besoins de l’Église et des pauvres’.). Nous retrouvons l’offrande dans la Prière Eucharistique : ‘L’Église, surtout celle qui est actuellement ici rassemblée, offre au Père, dans le Saint-Esprit, la victime sans tache. L’Église veut que les fidèles non seulement offrent cette victime sans tache, mais encore, qu’ils apprennent à s’offrir eux-mêmes et soient parfaitement réunis (….)’ (PGMR, 79). Il s’agit de s’unir au Christ dans l’offrande du sacrifice (PGMR, 78). La quête monétaire est donc un moyen pour les fidèles de s’associer à l’offrande du Christ. C’est d’ailleurs en lui qu’elle trouve son sens : en effet, le Christ de riche qu’il est, s’est fait pauvre afin de nous enrichir par sa pauvreté (cf 2 Co 8, 9). La quête dominicale donne sens aux autres dons que nous pouvons faire par ailleurs et peut éviter de transformer notre Église en ONG.

Pour cela, il convient :
– d’en rappeler le sens souvent méconnu ou oublié
– d’en soigner l’annonce sans le faire d’une manière systématique
– d’éviter qu’elle ne serve surtout à couvrir les frais de fonctionnement de la paroisse aussi légitimes soient-ils.

Bruno Mary
Directeur du Service National de la Pastorale Liturgique et Sacramentelle

 

 

Sur ces questions liturgiques, on consultera avec intérêt le site spécialisé .