Plaidoyer pour l’élargissement d’un accueil digne à tous les exilés
Par Laurent Giovannoni, responsable du département Accueil et droits des étrangers au Secours Catholique – Caritas France, partenaire du SNMM, suite à l’accueil des réfugiés d’Ukraine depuis février 2022.
« Nous nous réjouissons d’abord de l’élan de solidarité important qui s’est manifesté un peu partout en France. Le dispositif mis en place par les pouvoirs publics est certes un peu complexe, mais c’est parce qu’a été mise en œuvre pour la première fois une directive européenne jamais utilisée jusque-là. Elle prévoit un dispositif complètement inédit sur les plans juridique et social.
Cela posé, nous avons deux principaux points de plaidoyer. Premièrement, nous demandons qu’il y ait auprès de chaque Préfecture une réelle concertation entre l’ensemble des acteurs engagés dans l’accueil. Cette coordination est indispensable pour qu’une complémentarité se crée entre services de l’État, opérateurs professionnels de l’accueil, collectivités territoriales, et les réseaux associatifs et citoyens comme les nôtres. Il faut profiter de l’élan de solidarité qui s’est créé pour renouer, renforcer ou créer ces lieux de concertation et de coordination, au niveau départemental et local.
C’est cette coordination qui permet aux réseaux citoyens et bénévoles d’agir de la façon la plus pertinente possible, sans se substituer à l’État, mais en apportant du lien social, de la fraternité, un complément dans les aides, etc. C’est important, car l’hospitalité n’est pas qu’une affaire de technique. L’intégration sociale est essentielle, et ce sont les collectifs de citoyens qui la permettent. Cette inclusion est indispensable pour les personnes accueillies, mais aussi pour la société, car elle permet le changement de regard et l’ouverture à l’autre.
Nous craignons un « deux poids deux mesures »
Deuxièmement, beaucoup de dispositions favorables ont été mises en œuvre pour l’accueil des Ukrainiens. Cela montre que quand l’État veut, il peut accueillir dignement. Il faut s’en réjouir, mais en revanche, on ne peut pas se féliciter de l’écart grandissant entre les conditions offertes aux exilés ukrainiens, et celles offertes à d’autres exilés qui fuient des situations tout aussi catastrophiques, comme les Soudanais et les Afghans.
Les autres demandeurs d’asile malheureusement sont bien loin de disposer de la même dignité dans l’accueil. Élargissons donc les dispositions favorables offertes aux réfugiés ukrainiens à l’ensemble des personnes qui demandent l’asile, et qui ont tout autant besoin d’un accueil digne : hébergement systématique, droit au travail immédiat, facilitation pour obtenir rapidement une protection, une carte d’allocation, etc. Car nous craignons un « deux poids deux mesures » qui n’est pas conforme aux valeurs d’égalité, de fraternité et de justice que nous défendons. »
Élargissons les dispositions d’accueil offertes aux Ukrainiens à l’ensemble des exilés demandant l’asile