Solidaires de la population centrafricaine
À la suite de l’assassinat le 29 juin 2018 du vicaire général de Bambari, l’abbé Firmin Gbagoua, les messages de solidarité et de dénonciation des violences contre l’Église se multiplient. Monseigneur Georges Pontier, archevêque de Marseille et président de la Conférence des évêques de France, a exprimé son soutien à l’évêque de Bambari.
Lettre de Monseigneur Georges Pontier, Archevêque de Marseille et Président de la Conférence des évêques de France (CEF) à Mgr Bertrand-Guy-Richard Appora Ngalanibe, évêque de Bambari (RCA).Excellence, Cher Père, Alors que le message du 24 juin de votre assemblée plénière, réunie à Berbérati, rappelait les souffrances vécues ces dernières années et particulièrement dans les assassinats de plusieurs prêtres, vous invitiez la communauté chrétienne et les hommes et femmes de bonne volonté avec force « Ayez toujours en main le bouclier de la foi » pour continuer la reconstruction du pays.Quelques jours plus tard, une fois de plus, votre diocèse était touché par l’assassinat de votre vicaire général, Mgr Firmin Gbagoua. Au nom de l’Église qui est en France et en mon nom propre, nous nous associons à cette nouvelle épreuve pour votre diocèse et à votre deuil. Au nom des liens qui nous lient à l’Église de Centrafrique par l’histoire, la vie missionnaire et l’accueil de frères prêtres venus chez nous pour servir en pastorale, pour étudier ou pour se refaire une santé, je veux vous assurer de notre communion dans la prière, de notre attention à ce que vivent votre épiscopat et votre Église. Nous partageons pleinement vos affirmations « qu’Il n’y a pas de réconciliation ni de développement durable sans justice et que la mise en œuvre d’une justice forte est garante du droit pour les victimes. Pour nous croyants, elle passe aussi par l’approfondissement de la foi, la prière, l’amour et le pardon ». A vos côtés et dans l’espérance, nous savons que le sang versé est source de vie nouvelle dans le Christ. Que le courage qui est le vôtre porte du fruit dans votre Église et pour votre pays. En communion fraternelle, Monseigneur Georges Pontier, Archevêque de Marseille et Président de la Conférence des évêques de France. |
La Conférence épiscopale centrafricaine avait dénoncé cet assassinat par un groupe de rebelles en s’interrogeant : « à qui profitent donc toutes ces violences contre l’Église catholique en Centrafrique ? » et en interpellant gouvernement et Minusca (Mission des Nations Unies en Centrafrique). Dans le même communiqué, la CECA invitait la communauté chrétienne au calme et à la prière.
Le Service de la Mission universelle, quant à lui, s’est associé au communiqué publié par une plateforme d’ONG et d’institutions catholiques.
Centrafrique : solidaires de la population centrafricaine, nous refusons de voir s’imposer le règne de la terreur.
Nous, organisations engagées en République Centrafricaine, sommes profondément préoccupées par la sévère dégradation de la situation sécuritaire en République Centrafricaine. Une succession d’événements tragiques a marqué le début de l’année 2018, sabotant les efforts quotidiens de la population pour préserver le vivre-ensemble et faire face aux défis de la pauvreté.
Le 29 juin 2018, à l’évêché du Diocèse de Bambari, l’abbé Firmin Gbagoua, directeur de Caritas Bambari depuis 2010, a été assassiné par balles par des éléments de groupes armés.
Il était profondément engagé en tant que prêtre proche des fidèles, en tant qu’intellectuel, en tant qu’homme de terrain comme Secrétaire Diocésain de la Caritas Bambari depuis 2010.
Depuis mars 2018, il s’agit du 3ème prêtre assassiné dans ce pays. Lieux de refuge, havres d’accueil pour l’ensemble des populations, les communautés religieuses ont été violemment visées et touchées. L’assaut du 10 avril au quartier du Pk5 à Bangui, et les troubles qui en ont découlé, ont également fait de nombreuses victimes. Pourtant de plus en plus de voix s’élèvent pour affirmer que ces violences n’ont pas pour origine un rejet entre communautés de différentes confessions, qui vivent ensemble depuis longtemps.
Ces événements tragiques s’inscrivent dans une dégradation générale et rapide de la situation sécuritaire du pays depuis plusieurs mois, et sont motivés par des raisons autres, notamment l’intérêt pour les richesses naturelles du pays.
Une géographie de la terreur s’est imposée, avec de nombreuses villes et plusieurs villages assiégés : Batangafo, Mobaye, Zemio, Ndéle, Bria, Bambari, l’axe Mbres – Kaga Bandoro. En effet, 14 des 16 préfectures restent dominées par des groupes armés, composés en partie d’éléments étrangers, franchissant aisément les frontières difficiles à garder. Ces groupes, instables dans leur composition et leurs alliances, nébuleux dans leur organisation, pratiquent viols, rapts et traite d’êtres humains.
Face à cet état de fait, l’Etat peine à rétablir son autorité et assurer ses fonctions régaliennes.
A l’heure actuelle, on compte près de 700 000 personnes déplacées, et près de 500 000 réfugiées à l’étranger, selon Najat Rochdi, coordinatrice humanitaire des Nations Unies en RCA.
En cette année 2018, 70ème anniversaire de la signature de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, nous sommes profondément attristés et préoccupés par cette situation qui meurtrit tout un peuple, qui voit, impuissant, se désagréger un vivre ensemble jusque-là possible entre différentes communautés sur le territoire.
Nous, organisations solidaires de la population centrafricaine :
- Nous condamnons fermement toutes formes de violences, et rappelons que toutes les vies sont précieuses ;
- Nous apportons tout notre soutien aux efforts déployés par les responsables des différentes communautés pour résister à tout ce qui attise les divisions et la haine, détruisant la cohésion nationale ;
- Nous demandons que la justice s’exerce à travers la poursuite des criminels impliqués dans les assassinats, dont ceux des 3 prêtres, et qu’aucun crime ne reste impuni ;
- Nous demandons au gouvernement centrafricain de dénoncer les actes odieux et barbares perpétrés, et de combattre les groupes armés illégitimes qui déstabilisent le pays, et précarisent dramatiquement la vie des centrafricains ;
- Nous demandons au gouvernement centrafricain, ainsi qu’à la communauté internationale, de mobiliser tous les organes en mesure de protéger les populations et en particulier les leaders de réconciliation et de paix ;
- Nous demandons aux autorités françaises et européennes de dénoncer publiquement la dramatique situation centrafricaine ;
- Nous réaffirmons notre solidarité avec la population centrafricaine, qui n’aspire qu’à vivre en paix dans la richesse de sa diversité culturelle et confessionnelle dans ce pays qui est le sien, une population qui travaille avec ses moyens et toute son intelligence pour briser la spirale de la pauvreté et de la violence.
S’unir dans une lutte contre la pauvreté, en appliquant de façon déterminée une démarche inclusive, exiger ensemble une justice nationale et internationale impartiale, soutenir et renforcer solidairement tous les efforts du vivre-ensemble et du respect mutuel tracent un chemin sûr vers la paix durable.
Signataires : Académie de la Paix; Actions Solidaires du Grand Ouest de Centrafrique, zone France-Europe; Alliance Evangélique Mondiale; Aide aux Eglises d’Afrique; Caritas Internationalis; Congrégation du St Esprit – France; Délégation Catholique pour la Coopération; Observatoire Pharos; Pax Christi – France; Secours Catholique Caritas France; Service de la Mission universelle – Conférence des Evêques de France.
Contact presse : Christelle Bresin, Secours Catholique / Caritas France – christelle.bresin@secours-catholique.org; +33 1 45 49 73 23
Paris, le 11 juillet 2018
Communiqué de soutien à la RCA