Le Centre Damien de Molokai au Bénin
Un voyage réunissant 45 personnes a eu lieu en octobre-novembre 2019 au Bénin, à l’occasion de l’inauguration officielle du Centre, lieu de loisir et d’éducation pour enfants, dont l’idée a germé il y a une dizaine d’années et qui s’est mis progressivement en route. Marie-Liesse Gauvin, bénévole au SNMUE, participait à ce voyage et nous présente le projet.
Bref aperçu du Bénin
Pays d’Afrique de l’Ouest indépendant depuis 1960, le Bénin, anciennement République du Dahomey pendant la colonisation française, et auparavant composé de plusieurs royaumes, s’étend sur 692 km pour seulement 121 km de côte sur le golfe de Guinée. Ses voisins sont le Togo à l’ouest, le Nigeria à l’est, le Niger et le Burkina Faso au nord. Partagé en deux par un climat subéquatorial chaud et humide au sud et un climat chaud et sec au nord, la végétation est abondante au sud tandis que la savane règne au nord. La plaine côtière est très basse et parsemée de lacs, marécages et lagunes.
La démocratie est encore fragile dans ce pays où le pouvoir est maintenant détenu par un président controversé qui ne respecte pas les droits de l’opposition. Le Bénin connaît une très forte croissance démographique de +2,7 % avec 43 % d’enfants de moins de 15 ans. De 2.500 millions habitants en 1960, la population atteint aujourd’hui plus de 11 millions, avec cependant un taux de mortalité infantile important surtout dans les campagnes.
Malgré une croissance du PIB de 6 % en 2018, le pays reste largement en développement et très dépendant du Nigeria voisin, tandis que la population vivant sous le seuil de pauvreté est estimée à 40%.
La majorité de la population est chrétienne (48,5 % en 2013) et surtout composée de catholiques, mais le pourcentage de musulmans a tendance à augmenter (27,7 %). Il existe aussi des religions traditionnelles comme le vaudou, toujours vivace, qui compte 11,6 % d’adeptes.
Création du Centre Damien de Molokai
C’est en 2009 que l’initiative d’un centre d’accueil pour les enfants a émergé. Un prêtre franco-béninois, partant du constat que le système éducatif béninois n’était pas adapté à l’explosion démographique du pays, au manque d’infrastructures et de personnel et à des méthodes d’éducation trop basées sur la violence, désirait vivement faire évoluer l’éducation des enfants dans le pays. Parallèlement, une volontaire de la DCC ayant passé deux ans au Bénin, et formée à l’accueil des enfants et à l’animation en paroisse, souhaitait qu’un lieu pour les enfants en résonnance avec ses idées voie le jour. De leur rencontre et grâce à un réseau de relations en France, des fonds purent être levés pour l’achat d’un grand terrain dans le village d’Agonsoudja au nord de Cotonou, capitale économique du Bénin. Désormais le projet était lancé. Grâce au soutien de l’association française Centre Damien de Molokai, inspirée par l’œuvre missionnaire de saint Damien, les bâtiments virent progressivement le jour, et depuis 2009, des jeunes volontaires français viennent y passer trois semaines l’été pour aider au développement scolaire et périscolaire (théâtre, ateliers d’écriture, contes…), d’une centaine d’enfants inscrits chaque année pour ce programme.
Outre les activités artistiques et d’accompagnement scolaire, l’éducation à l’environnement est au cœur de la pédagogie (jardins-potager bio, respect de la nature) grâce au beau parc du domaine dont une grande partie est cultivée. Ainsi l’épanouissement des enfants passe par une éducation destinée à les rendre acteurs de leur avenir et du développement de leur pays. Limité à l’accueil des enfants l’été pendant plusieurs années, le projet s’est étendu depuis 2018 à la création d’une école destinée à la petite enfance et s’inspirant de la méthode Montessori, qui grandira peu à peu pour avoir chaque classe de primaire. Le but est aussi de devenir plus autonome financièrement en accueillant des visiteurs et groupes béninois sur place et en vendant les produits du potager.
Dix ans plus tard : l’inauguration du centre, la Cité Saint-Damien en novembre 2019.
De beaux bâtiments, en partie en briques fabriquées dans le Centre, ont été construits pendant ces dix ans tandis que le potager produisait de plus en plus. L’association désirait marquer cette étape des dix ans. Pour cela un voyage au Bénin pour les membres de l’association et leurs proches avait été décidé : 45 personnes dont la moitié ne connaissait pas le Bénin se sont inscrites. Le séjour a duré dix jours dont trois consacrés à des conférences au Centre Damien et à l’inauguration officielle, auxquelles étaient largement invitées toutes les personnes voisines intéressées par le Centre.
Le premier jour, les conférences portèrent sur le défi de l’école pour former des hommes et des femmes capables. Sr Anicette Quenum, supérieure des sœurs OCPSP et enseignante à l’université d’Abomey-Calavi, fit une conférence remarquée sur la dimension prophétique de l’éducation qui permet de préparer l’avenir des enfants, de s’y engager avec foi. Les autres intervenants montrèrent également ce souci d’améliorer le système éducatif pour être en phase avec la situation économique, véritable défi pour le Bénin.
Le deuxième jour a été consacré à la conversion écologique, nouvel impératif de l’éducation. Autre défi du Bénin qu’expliqua Mgr Aristide Gonsallo, évêque de Porto-Novo, capitale officielle du Bénin, en soulignant que l’environnement est déjà un droit constitutionnel (constitution de 1990). Pourtant l’essence de contrebande venue du Nigeria, les taxi-motos, les camions et véhicules d’occasion importés d’Europe polluent sérieusement l’environnement et étouffent la population.
L’Église est très consciente des problèmes écologiques et, avec l’aide de missions étrangères a encouragé la création de fermes agro-écologiques pour former des agriculteurs à la culture écologique. De jeunes volontaires de la Fidesco accompagnaient Mgr Gonsallo et nous ont parlé de leur mission : former des enfants au respect de l’environnement pour les sensibiliser au travail de la terre et développer la culture et la vente de l’artémisia, plante efficace et bon marché dans la prévention et le traitement du paludisme.
Le troisième jour a vu la cérémonie d’inauguration avec les discours des responsables et des officiels dont l’ambassadeur de France, suivis d’une très belle messe célébrée par le P Théophile Akoha, vicaire général du diocèse de Cotonou, et animée par la magnifique chorale du Bon Pasteur de Cotonou. Nombreux étaient les participants, notamment du village, et la joie était sensible. L’archevêque de Cotonou, Mgr Roger Houngbédji vint également un après-midi animer la prière d’action de grâces et visiter le Centre.
Les participants au voyage ont pu découvrir les jours suivants d’autres aspects du Bénin. Spectacle de danses traditionnelles, visite de Cotonou, messe et rencontre avec les prêtres de la paroisse Saint Michel, marche dans un parc naturel avec de nombreuses espèces végétales et animaux du pays, rencontre avec les élèves et le directeur d’une école publique à Agonsoudja (près de 800 élèves pour six instituteurs…),visite du séminaire Saint Gall, un des plus grands d’Afrique de l’Ouest qui accueille environ 200 séminaristes, puis visite de Ouidah, capitale du vaudou et ville historique car elle a été le port de départ des quelques 15 millions d’Africains envoyés comme esclaves en Amérique. Tout le groupe a suivi à pied le parcours émouvant de l’esclave jusqu’à la Porte du Non-Retour (arche commémorative). Visite le lendemain de Porto-Novo et de la cité lacustre des Aguégués où le groupe a été chaleureusement accueilli par le curé de la paroisse et par de nombreuses pirogues venues saluer et chanter pour les Français. Les pluies diluviennes qui étaient tombées les jours précédents avaient inondé de nombreuses huttes sur pilotis et même l’intérieur de l’église. Cela a permis de découvrir les conditions de vie très difficiles des habitants des cités lacustres. Enfin visite de Grand Popo, village de pêcheurs et de tourisme pour ses belles plages de sable fin (mais dangereuses pour la baignade !).
Le dernier jour a été un moment fort avec la messe dans le village d’Agonsoudja où tout le groupe a été accueilli par le curé et ses paroissiens qui ont chanté pour eux.
Un voyage inoubliable par la qualité de la préparation, la chaleur de l’accueil des habitants, les images fortes qui resteront gravées dans la mémoire et la découverte du Centre Damien, qui comme d’autres projets missionnaires, est parti d’un élan généreux d’aide aux enfants afin qu’ils puissent améliorer l’avenir de leur pays.
Soutenez le Centre Damien de Molokai pour qu’il poursuive sa mission au service des enfants ! Des concerts de chants africains et autres manifestations ont lieu en France au long de l’année et sont annoncés sur le site.
Marie-Liesse Gauvin
SNMUE – décembre 2019