Place de la femme dans l’Église en Afrique
À l’heure des grands débats sur cette question, j’ai simplement envie de dire que, comme africaines dans l’Église, nous avons « une place » et nous essayons de bien la tenir … La question, c’est peut-être, en effet, quelle place ? Elle n’est pas celle des pouvoirs, ni des décisions mais elle est celle que nous donne la foi au Christ depuis des siècles… Le constat est unanime partout dans le monde : ce sont les femmes qui font vivre l’Église !
Ce constat est tellement vrai en Afrique que lorsque je considère les différentes Églises où j’ai eu la joie de servir, j’ai l’impression que, de manière naturelle ou par la force des choses, la présence des femmes est devenue comme indispensable à l’Église et cela à tous les niveaux de la vie ecclésiale. Elles assument complètement les dimensions de la mission que sont : la Communion, la Liturgie, mais aussi le Témoignage et le Service. Responsables des Communautés Ecclésiales de Base (CEB), elles sont devenues de vraies actrices de développement du pays, donnant ainsi « corps » à la pensée sociale de l’Église.
Personnellement, quand on parle de la place des femmes dans l’Église, j’aime à penser à toutes les femmes qui accompagnaient Jésus dans la Bible. En effet, elles étaient là, de tout temps, à toute heure, le servant par leurs biens aussi bien que par leurs personnes. Elles suivent et servent Jésus en silence. Seules, leurs actions sont « parole » puisque la Bible fait peu mention de leurs paroles.
Cela est encore vrai aujourd’hui en Afrique. Les femmes s’investissent partout, là où l’Église a besoin d’elles et comblent bien des manques… Bien que souvent pauvres elles-mêmes, elles font tout pour aider matériellement et financièrement les prêtres de leurs paroisses, et cela avec une certaine fierté.
Les débats qui agitent les gens en Europe sur la question des responsabilités ou encore de pouvoir de décision sont réels mais ne semblent pas être le problème des femmes dans l’Église en Afrique. Des tensions existent à ce propos mais il semble que la prise de conscience de leurs actions, de leur participation à la vie ecclésiale est une force qui leur donne en fait une place au sein des communautés. Je ne pense pas qu’une paroisse digne de ce nom puisse se passer de la présence des femmes en son sein. Elles sont devenues non seulement « les mains et les pieds » de l’Église mais aussi « la tête, les yeux, le cœur, les poumons » de l’Église.
Il me semble qu’une certaine co-responsabilité s’est faite comme ça, tacitement et subtilement, au grand dam de certains curés « imbus de pouvoir ». Ils sont bien obligés de composer avec elles parce que, sans elles, rien ne va ! Il est vrai que cette question de la place des femmes dans l’Église interroge quand même…
Comment comprendre que l’Église, qui a toujours défendu les droits et permis à nos sociétés d’avancer sur ce chemin, résiste à donner l’exemple en son sein ? Il y a sûrement beaucoup à dire et je partage bien des arguments avancés pour appeler à reconnaître officiellement cette place que, de fait, les femmes tiennent dans l’Église.
Pour me consoler, j’aime à dire qu’accueillir et vivre l’Évangile est toujours une question de conversion. Pourtant, elle est parfois longue à venir… Et j’ose croire que nous sommes en chemin puisque le débat a aussi commencé dans les « hautes sphères » de l’Église comme à la base.
Espérons que la parole qui se libère de plus en plus sera entendue pour que « notre Église » continue à honorer son qualificatif « d’experte en humanité » !
Sœur Jeannette Londadjim
Sœur de Saint Joseph
Tchadienne, a été en service au Sénégal, en Algérie, aujourd’hui en France.