Côte d’Ivoire : justice et réconciliation

La Conférence épiscopale de Côte d’Ivoire est en assemblée plénière du 26 au 31 juillet 2020. Quelques jours auparavant, elle présentait à la presse sa dernière lettre pastorale, intitulée : « L’Église en Côte d’Ivoire au service de la réconciliation, de la justice et de la paix ». Une tâche de longue haleine, puisque, concluent les évêques ivoiriens, « nous naissons les poings fermés. Il faut toute la vie pour apprendre à les ouvrir ». Dans le contexte des prochaines élections présidentielles, prévues pour le 31 octobre, l’Église de Côte d’Ivoire se veut ferment de réconciliation et de communion, constructrice de paix dans la justice et la vérité.
On lira ci-dessous l’article de présentation de la lettre pastorale publié par l’Association Catholique pour l’Information en Afrique, ACI Afrique, agence de presse continentale au service de l’Église en Afrique.

2020.07.29_Côte-Ivoire_Justice&Reconciliation. Côte d’Ivoire justice et réconciliation

Le père Emmanuel Wohi Nin (à gauche), secrétaire général de la Conférence épiscopale de Côte d’Ivoire (CECCI), présentant la lettre pastorale des évêques sur la réconciliation, la justice et la paix, lors d’une conférence de presse le mardi 21 juillet.

Les évêques catholiques de Côte d’Ivoire ont, dans leur lettre pastorale, mis en évidence les conditions nécessaires pour parvenir à la réconciliation, à la justice et à la paix dans ce pays d’Afrique de l’Ouest, dans un contexte de tensions politiques croissantes à l’approche de l’élection présidentielle prévue en octobre 2020.

« La réconciliation doit être inclusive et participative en ce sens qu’elle ne doit exclure aucun antagonisme« , ont écrit les membres de la Conférence épiscopale de Côte d’Ivoire (CECCI) dans ce document de 79 pages, qui a été présenté aux journalistes mardi 21 juillet.

La réconciliation, poursuivent les évêques, « doit s’accompagner d’actes courageux et honnêtes : rencontrer les protagonistes de la crise, s’écouter mutuellement, reconstruire une histoire commune, accepter le passé douloureux, prendre en compte les souffrances de chacun, accepter les motivations, les raisons et les causes de la crise« .

Selon les évêques, « la promotion d’un ordre juste, le respect du principe de subsidiarité et la lutte contre la corruption » sont trois conditions nécessaires à la réalisation de la justice dans ce pays d’Afrique de l’Ouest.

« Ces dernières années, les autorités gouvernementales de toutes tendances idéologiques dans notre pays ont toujours essayé de manipuler la justice en fonction de leurs intérêts« , déplorent les évêques dans leur document collectif intitulé « L’Église en Côte d’Ivoire au service de la réconciliation, de la justice et de la paix« .

La manipulation de la justice, disent-ils, se fait « soit pour nier la nationalité ivoirienne, soit pour la vendre, soit pour rendre inéligible un opposant politique, soit pour livrer à la justice internationale certains compatriotes alors que d’autres responsables de crimes jouissent de leur liberté ».

Dans leur lettre pastorale en 83 points, les évêques notent que pour parvenir à la paix, « il ne suffit pas d’organiser des élections pour que le pays soit en paix. « Il faut plutôt, selon eux, « cultiver l’amour et la fraternité entre nous, par des paroles, des actions et des relations empreintes de convivialité« .

« Seule une authentique réconciliation accomplie dans la vérité et la justice apportera une paix durable à la société ivoirienne« , disent les évêques dans leur message, qui est divisé en trois grandes sections : une Église appelée à vivre la communion avec Dieu, les autres et la création ; une Église-communion au service de la réconciliation, de la justice et de la paix ; et l’engagement de tous à construire une société de paix.

Nous naissons les poings fermés. Il faut toute la vie pour apprendre à les ouvrir.

Ils poursuivent : « Ce sont donc tous les fils et les filles de la Côte d’Ivoire, les évêques, les prêtres et toutes les personnes consacrées, y compris les personnes consacrées, qui sont appelés à construire et à consolider la paix« .

Selon eux, « l’Église ne pourra contribuer de manière crédible à la construction et à la consolidation de la cohésion sociale en Côte d’Ivoire que si les pasteurs et les fidèles laïcs se réconcilient entre eux« .

« La perte de crédibilité et de discrédit dans la mission, exige de nous une attitude renouvelée et résolue pour résoudre les conflits au sein de l’Église« , ajoutent les évêques.

Les tensions en Côte d’Ivoire, premier producteur mondial de cacao, augmentent le long des lignes de fractures politiques et ethniques, à l’approche des élections présidentielles du 31 octobre.

Si la décision du président sortant Alassane Quattara de se retirer de la course en mars a permis d’éviter un différend important sur la constitutionnalité de sa candidature à un troisième mandat, la mort soudaine du Premier ministre Amadou Gon Coulibaly, le 8 juillet, a ravivé les tensions, qui sont aggravées par les lamentations des dirigeants de l’opposition qui se plaignent d’être intimidés pour les décourager de concourir.

La direction du principal parti d’opposition du pays, le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), a boycotté la participation aux activités de la Commission électorale indépendante au motif que cet organe est dominé par les alliés politiques du président.

Les tensions se sont accrues alors que les hommes politiques du gouvernement et de l’opposition débattent de l’opportunité de reporter les élections en raison de la pandémie de COVID-19, qui a infecté au moins 14 531 personnes et en a tué 93 autres alors que 8 857 patients se sont rétablis.

Au milieu des tensions croissantes, le secrétaire général de la CECCI, le père Emmanuel Wohi Nin, a déclaré que la lettre pastorale des évêques est une invitation à « regarder ensemble et objectivement la situation de crise que notre pays connaît depuis de nombreuses années et ses conséquences qui touchent tout le monde en chair et en os.

Mercy Maina
Aciafrique

 

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