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Colombie, heurs et malheurs du processus de paix

1- Communiqué de la Conférence des Évêques de Colombie (3 octobre 2016)

Nous, évêques catholiques de Colombie, à la suite des résultats du referendum en vue de l’approbation des accords entre le Gouvernement National et les FARC-EP, nous reconnaissons et apprécions l’exercice démocratique réalisé ce 2 octobre par le peuple colombien.

Le résultat de ce referendum doit nous inviter à une réflexion profonde sur les situations qui marquent le moment actuel de notre pays. Il n’y a pas de place pour les triomphalismes ou les défaitismes. Faisons plutôt de ce moment une magnifique opportunité pour travailler ensemble à la réconciliation et à la concorde entre les Colombiens.

Fresque-paix-Colombie

Fresque pour la paix, Colombie.

Nous voulons tous la paix ! C’est la première évidence du résultat du referendum, mais cette paix que nous désirons, nous ne pourrons la construire qu’en dépassant la polarisation et les divisions pour nous unir autour d’un idéal commun de pays. Nous invitons donc tous les Colombiens à une analyse objective de la réalité, à un dialogue respectueux et fraternel, à l’unité, à la générosité. Promouvons « une culture de la rencontre » qui dispose les esprits au pardon et à la réconciliation.

Nous apprécions les dispositions exprimées par monsieur le Président de la République dans son allocution au terme de la journée électorale, convoquant à un pacte national en faveur de la paix. Nous réitérons la volonté de l’Église catholique de participer, selon la mission pastorale qui est la sienne, à la conception et à la mise en œuvre d’initiatives qui aident à éradiquer les racines de la violence, à défendre la vie et la famille, et à favoriser pour les Colombiens un vivre ensemble dans la paix et la justice.

Nous appelons nous aussi le Gouvernement National, les leaders politiques et sociaux du pays et les FARC-EP à abandonner les intérêts personnels et de groupe, à approfondir sereinement la manifestation démocratique que nous venons de vivre et à en tirer les conclusions, afin de conserver la volonté du dialogue.

Nous insistons également sur le fait qu’il est nécessaire d’affronter d’autres problèmes graves que vit notre pays. Nous ne pouvons renoncer à notre objectif de parvenir au bien commun et au développement intégral.

Nous exhortons les communautés et institutions catholiques à « persévérer dans la prière, d’un commun accord » (Ac 1, 14), en demandant pour notre nation le don inestimable de la paix. Nous les invitons également à entretenir une foi et une espérance vivante en Jésus-Christ, qui nous envoie comme artisans du pardon et de la réconciliation, pour construire la paix avec passion, patience et courage. Renouvelons notre intention d’écouter la voix de Dieu et demandons-lui sa grâce pour assumer les défis de l’aujourd’hui de notre histoire.

Recourons à l’intercession Notre-Dame du Rosaire de Chiquinquirá. Mère de miséricorde, qu’elle obtienne pour nous du Seigneur les dons de l’unité, de la réconciliation et de la paix.

Le texte original du communiqué de la Conférence des Évêques de Colombie se trouve (en espagnol) sur le site de la Conférence de Colombie.

(traduction par Annie Josse, SNMUE)

2- L’Église colombienne et le processus de paix

Conference-episcopale_ColombieEn date du 9 septembre 2016, la Commission Permanente de la Conférence Épiscopale colombienne publiait un communiqué invitant à « assumer ce moment de manière responsable et engagée. Nous les croyants, nous ne pouvons pas avoir une attitude d’indifférence ou de désintérêt devant le processus que nous sommes en train de vivre ».

Elle réitérait également ce qu’elle exprimait à la fin de l’Assemblée Plénière de l’Épiscopat en juillet 2016 : « Nous appelons le peuple colombien à participer à la consultation sur les accords de La Havane, de manière responsable, par un vote éclairé et en conscience qui exprime librement son opinion… ». Les évêques indiquent que cela ne signifie aucunement que l’Église  et les évêques soient neutres « devant la construction de la paix, puisque la réconciliation et la paix sont au cœur même de l’Évangile ».

Mgr Luis Augusto Castro Quiroga

Mgr Luis Augusto Castro Quiroga

Les catholiques colombiens sont appelés à une journée de prière, le 29 septembre, pour demander la paix et l’engagement dans la construction de celle-ci.Le Pape avait été invité le 12 août à nommer un représentant au comité de sélection des magistrats de la « Juridiction spéciale pour la paix », l’organe ad hoc créé pour superviser les accords de paix. Il a préféré refuser à cause de la vocation universelle de l’Église. Le Président de la Conférence Épiscopale colombienne, monseigneur Luis Augusto Castro Quiroga, précise que cela ne doit pas être interprété comme un désaccord avec le processus, mais que tout au contraire « la position du Pape et de l’Église est celle d’un soutien total au processus de paix ».

D’autre part, la Commission de Conciliation Nationale de la Conférence Épiscopale propose aux évêques, prêtres, religieux-religieuses et laïcs engagés la campagne « Pédagogie pour la paix », et, en lien avec le Département d’Animation Missionnaire, un atelier de formation et d’accompagnement pour prêtres, religieux, religieuses et laïcs, agents de pastorale dans les zones et camps des Farc-ep, dans le cadre des accords de paix de La Havane.

Note d’Annie Josse
15 septembre 2016

 

3- L’espoir grandit en Colombie … malgré les opposants à la paix et à la justice

Annie Josse commence au SNMUE sa responsabilité d’animatrice de réseaux ecclésiaux pour l’Amérique latine et l’Afrique. Elle vient de traduire l’article sur la situation actuelle de la Colombie, au moment de la signature des accords de paix, écrit par José Fabio Naranjo, enseignant et militant pour la paix à Medellin. L’article a été écrit en juillet 2016. La situation colombienne reste mouvante, il convient d’être attentif aux développements à venir.

Les événements récents comme imminents autour du processus de paix entre le Gouvernement et les FARC-EP laissent entrevoir un climat de grande espérance, de joie et d’une indubitable avancée politique en Colombie.

Les faits

Nous les énumérons brièvement. Tout d’abord, des six points qui composent l’agenda des négociations entre le Gouvernement et les Farc, cinq ont d’ores et déjà été signés. Le plus récent[1] est d’une importance capitale puisqu’il signifie la fin d’un conflit entre l’État et la plus puissante guérilla du pays, qui a duré 60 ans, et a fait des millions de victimes[2]. Cet accord comprend plusieurs éléments très importants, à savoir : « Cessez-le-feu bilatéral et définitif, fin des hostilités et dépôt des armes ». Parler de fin des « hostilités » signifie que les Farc ne commettront plus d’extorsions économiques comme celles qu’elles imposaient à de vastes secteurs de la population (commerçants, éleveurs, transporteurs, etc.) ni d’enlèvements (auxquels elles ont renoncé il y a déjà plus d’un an), et ne seront plus impliquées dans le narcotrafic ou les cultures illicites. Elles se sont également engagées à déposer les armes, qui seront remises à une délégation internationale présidée par l’ONU, dans un délai de 180 jours à partir de la signature de l’accord intégral et définitif autour de tous les points du calendrier. Soulignons que cet accord final[3], considéré comme imminent, août 2016 probablement[4], après plus de 4 années de négociations, a été confirmé par les faits, puisque les Farc ont cessé leurs attaques il y a déjà plusieurs mois, de telle sorte qu’aujourd’hui les paramilitaires et l’ELN (la deuxième guérilla en ordre d’importance) causent plus de morts que les Farc. De même et de façon tout à fait exemplaire, notons que d’importants secteurs de l’armée respectent l’accord signé, au point qu’armée et guérilla échangent de façon conviviale des informations afin de ne pas se rencontrer et d’éviter ainsi des affrontements.

Signature des accords à Cuba

Signature des accords de paix colombiens (Cuba)

Le second élément de l’accord, à notre avis décisif, consiste en l’ Accord sur les « Garanties de sécurité et de lutte contre les organisations criminelles responsables d’homicides et de massacres ou qui attentent contre les défenseurs des droits humains, les mouvements sociaux ou politiques, ceci incluant les organisations criminelles qualifiées de successeurs des paramilitaires et leurs réseaux de soutien, et la poursuite des comportements criminels qui représentent une menace pour la mise en œuvre des accords et la construction de la paix ». Cet accord est crucial et la réussite du processus de paix en dépend, puisque les paramilitaires sont et ont été l’ennemi numéro un de la paix et de la justice dans le pays. Les paramilitaires sont responsables d’environ 1300 massacres, contre près de 300 pour la guérilla ; ainsi que de fréquents assassinats de défenseurs des droits humains de leaders sociaux et communautaires dans le pays. En même temps, l’on doit aux paramilitaires la grande majorité des vols de terres et des déplacements de populations qui atteignent le chiffre effarant de près de 8 millions de victimes, un colombien sur 6 en moyenne. Les secteurs paramilitaires encore très présents dans diverses régions du pays reçoivent le soutien politique des forces d’extrême-droite commandées par l’ancien président et aujourd’hui sénateur Álvaro Uribe Vélez.

L’irremplaçable voix du peuple

L’accord du 23 juin se prononce en troisième lieu sur le mécanisme d’approbation populaire de tout le processus de paix. Selon une décision récente de la Cour constitutionnelle, cette approbation prendra la forme d’un référendum, composé d’une seule question relative à l’acceptation ou non, de la part des électeurs, de tous les accords signés. Les enquêtes déjà réalisées laissent prévoir un triomphe, dans certains cas écrasant, du OUI aux accords de Paix. Il faut souligner que la décision de la Cour constitutionnelle oblige naturellement à publier les accords dans leur intégralité et à organiser une formation à leur sujet au moins un mois avant la date du plébiscite. Cependant – signe du progrès politique que connaît la Colombie – ces accords sont diffusés de manière créative et pédagogique par de multiples secteurs qui appuient le processus de paix[5], de même que par le bureau du haut-commissariat pour la paix et d’autres instances officielles. Cette diffusion pédagogique manifeste clairement la joie, la décision majoritaire et l’intérêt de larges secteurs à s’engager dans le processus de construction de la paix et de transformation des habitudes politiques qui se mettra en route immédiatement après la signature de l’accord final[6], et dans l’évolution d’une période appelée « de Transition » d’une durée minimale de 10 ans. Tout semble donc indiquer que non seulement la paix avec les Farc sera signée définitivement et rapidement, mais que de plus elle déclenchera un gigantesque et positif processus social visant la transformation des conditions d’injustice, de violence et d’exclusion dans lesquelles s’est déroulée notre histoire. À ceci s’ajoute que de nombreux secteurs de la société civile font pression sur la guérilla de l’ELN pour qu’elle entre en pourparlers de paix avec le gouvernement de manière sérieuse et définitive et le plus rapidement possible.

Tout aussi important est le fait que tous les accords avec les FARC-EP seront contrôlés par « un mécanisme tripartite, composé de représentants du Gouvernement National (Force Publique), des FARC-EP, et un Composant International sous la forme d’une mission politique avec des observateurs non-armés de l’ONU, constituée principalement d’observateurs de pays membres de la Communauté des États Latino-Américains et Caribéens (CELAC)[7]. La Composante Internationale préside à toutes les instances le Mécanisme de Contrôle et de Vérification et est chargée de régler les différends, de présenter des recommandations et de produire des rapports ».

Finalement, un mois plus tard, le 24 juillet, un autre accord, capital et inédit dans d’autres processus de paix dans le monde, a été annoncé. Il s’agit de l’inclusion de la « perspective de genre » ou de la voix et des intérêts spécifiques des femmes et de leurs organisations dans l’ensemble de tous les accords. En vertu de cette inclusion, les délits sexuels, les féminicides et tant d’autres formes d’horreur et de violence auxquels des dizaines de milliers de femmes colombiennes ont été soumises dans l’impunité la plus totale, feront l’objet d’un traitement juridique sévère. Les femmes pourront également accéder directement au crédit, être propriétaires de terres et de nombreux autres droits qui représentent un grand pas en avant dans une société caractérisée par le machisme et dans laquelle la parole des femmes et de leurs organisations est réduite au silence. Cet accord constitue une raison primordiale pour soutenir le processus de paix et pour que le OUI à ce processus triomphe dans le plébiscite.

José Fabio Naranjo

José Fabio Naranjo

Gagner la paix en Colombie, une cause universelle

Il est de la plus haute importance pour le pays et pour le succès du processus que la communauté internationale à l’unanimité, du Pape François au Conseil de Sécurité de l’ONU, les USA, l’Union Européenne et une grande quantité de pays et d’instances internationales soutiennent, comme ils le font déjà, le processus de paix dans toutes ses étapes. Ceci présente un avantage et un exemple au niveau mondial.

En conclusion, la Colombie vit le processus le plus important de son histoire. Le chemin ne sera pas aisé, les ennemis de la paix ne cesseront de semer des embûches, mais la paix, la vérité, la réconciliation et la liberté se fraient un chemin au milieu des épreuves.

José Fabio Naranjo (Medellin, Colombie)
Traduction par Annie Josse (SNMUE).

[1] Signé le 23 juin.
[2] Il y a 8.092.394 victimes « recensées »,  7.809.143 « victimes du conflit armé » et 1.591.271 « victimes directes de disparition forcée et homicides ».
[3] Cet accord final scelle tout le processus puisque « rien n'est acquis quand tout n'est pas acquis ».
[4] L’accord conclu le 24 août à La Havane devrait être signé solennellement entre le 20 et le 26 septembre.
[5] Ce processus enrichissant d’avancée politique s’accompagne de ce que le père Francisco de Roux S.J., - qui a fait des apports  substantiels au processus -, définit comme la  “metanoïa” des Farc, c’est-à-dire le changement profond de la manière de penser de cette guérilla, qui a compris que la violence n’est en aucune manière une voie de solution aux problèmes sociaux et/ou politiques.
[6] En particulier le point 2 de l’agenda, qui se réfère à la Participation politique, signifiera un « élargissement de la démocratie colombienne » et parmi d’autres aspects (réforme du régime électoral corrompu, participation de nouvelles forces politiques alternatives parmi lesquelles la force politique que deviendront les Farc, sans risque d’être assassinées), la mise en place de Statuts de l’opposition auxquels travaillent déjà diverses forces politiques. Ces Statuts sont une décision intégrée dans la Constitution Politique en vigueur, dont nous venons de célébrer le 25e anniversaire. En Colombie « tout arrive tard, même la mort » comme le disait si bien un de nos poètes les plus célèbres, Julio Flórez.
[7] Les dernières informations parlent de 500 délégués internationaux, de divers pays dont Cuba, pour mener à bien cette tâche.

 

4- La Colombie à la veille de la signature des accords de paix

Le 29 février, Mgr Henao, directeur de la Caritas de Colombie, a fait à la Maison des Évêques une conférence sur la Colombie à la veille de la signature des accords de paix, sur les processus de paix et le rôle de l’Église. On trouvera ici un compte-rendu de son intervention, réalisé par Maud CLEMENT.

carte-amerique-latineL’exclusion sociale et politique, la pauvreté, les luttes armées, les étapes vers la paix… autant de thématiques abordées lundi 29 février à la Conférence des évêques de France autour de Monseigneur Hector Fabio Henao, directeur de la Pastorale sociale – Caritas Colombie et impliqué dans les négociations de paix menées en ce moment même entre le gouvernement colombien de Juan Manuel Santos et les Forces Armées Révolutionnaires de Colombie (FARC).

Mises en place par le Président Santos dès son arrivée au pouvoir en 2012, les négociations actuelles tentent de mettre un terme à un conflit qui dure depuis 50 ans et qui a causé la vie de 220 000 personnes et le déplacement de six millions d’habitants. Chaque famille colombienne est touchée et souffre d’une manière ou d’une autre des conséquences des affrontements violents, explique Mgr Henao, mais les solutions proposées par les différents groupes impliqués sont difficiles à combiner. En effet, si la situation colombienne est souvent réduite à la violence entre le gouvernement et les FARC, groupe armé marxiste d’origine paysanne, la réalité est bien plus complexe : d’autres groupes armés dont par exemple l’Armée de Libération Nationale (ELN), des groupes paramilitaires et des cartels de la drogue sont engagés dans ce conflit, qui n’a eu de cesse d’évoluer au fil du temps.

C’est dans un français fluide que Mgr Henao a exposé les grandes lignes du contexte colombien et les six points sur lesquels portent les négociations en cours entre le gouvernement et les FARC. Le premier volet concerne la question agraire, avec l’idée de mettre en place une « réforme intégrale » pour augmenter la rentabilité des cultures, endiguer les inégalités et réintégrer les guérilleros qui déposent les armes. Les parties en négociation se penchent également sur la question de la participation de tous et en particulier des FARC à la vie politique colombienne et sur la cessation du trafic de drogue et de la culture de la coca. De plus, la justice constitue une problématique majeure, charriant avec elle des questions sur l’établissement des faits, la punition des coupables, les réparations pour les victimes, et la transformation radicale du système judiciaire colombien. Le désarmement des combattants et la mise en place des accords conclus sont les derniers points des négociations.

Quant au rôle de l’Église, Mgr Henao affirme qu’il est crucial dans l’accompagnement des victimes, l’information sur les négociations en cours ainsi que l’établissement de la paix, puisque « la paix est une pratique et pas seulement une norme », comme l’explique Olivier Lagarde, coordinateur du Réseau France-Colombie et modérateur de la soirée.

Mgr-Hector-HenaoA dix reprises, la conférence épiscopale a pris place à la table des négociations de La Havane aux coté des victimes. En plus de travailler pour le droit des victimes à la vérité, aux réparations, à la restauration de leur dignité et à la non-répétition des conflits, l’Église se penche sur le sort de ceux qui ont commis des atrocités, afin de permettre leur réintégration dans la société. C’est à l’échelle locale et avec les communautés que l’Eglise souhaite contribuer à faire vivre la réconciliation, qui ne constitue pas un retour à la situation d’avant mais bien un pas vers l’avenir.

Si ces négociations semblent réellement incarner une avancée vers la paix, il n’en est pas moins vrai que d’autres étapes s’imposent au pays, d’autant plus que de nouveaux conflits liés aux extractions minières et pétrolières viennent se superposer à ce conflit vieux d’un demi-siècle. Il est maintenant important que chacun puisse être acteur de la démocratie et que la violence ne soit plus une condition pour avoir voix au chapitre. De ce fait, un accord avec l’ELN paraît également indispensable. De même, des changements structurels et des transformations des mentalités en profondeur sont souhaitables pour réduire la corruption, le trafic de drogue et la violence qui minent l’Etat et font obstacle à la paix et à la démocratie. Temps et efforts seront probablement nécessaires pour pacifier le pays. Pour les populations, les négociations actuelles signifient espoirs et défis, inextricablement mêlés.

 

Maud CLEMENT
Mars 2016

Panorama de presse de la visite de Mgr. Henao : KTOLa Croix Pax Christi 

5- Colombie : où en sont les négociations de paix ?

France-ColombieLe Réseau est un collectif d’associations et d’organisations sociales de la société civile française, en lien avec des partenaires en Colombie. L’objet du Réseau est de renforcer les liens solidaires entre la France et la Colombie par la coopération.

 

En février et mars 2016, le Réseau France Colombie Solidarités a édité et diffusé une série de communiqués expliquant les différents points à l’agenda des négociations de paix à La Havane, alors que le 23 mars avait été défini comme date butoir par le gouvernement et les FARC pour signer définitivement la paix.
Finalement, rien n’a été signé ce jour-là et les discussions se poursuivent. En effet, il existe encore des points sur lesquels les parties ne se sont pas mises d’accord. Des avancées continuent d’avoir lieu, rapprochant encore un peu plus la Colombie d’un accord de paix historique. Mais la situation sur le terrain génère toujours des inquiétudes.
Le RFCS vous propose donc ce bulletin d’actualités, pour comprendre le contexte et analyser les perspectives.

Post- 23 mars
Post_23-marsLes divergences étaient encore trop grandes entre les FARC et le gouvernement pour annoncer une issue politique au conflit armé ce jour-là. Il a été jugé plus sage de reporter sine die la conclusion des pourparlers. Il restait des éléments complexes à régler, concernant principalement les modalités du dépôt des armes et celles liées à la consultation populaire pour légitimer les accords auprès de la population. Depuis, le bruit court de l’annonce d’un accord pour fin juin, avec un référendum organisé en septembre.

L’accord figurera dans la constitution
ConstitutionLe 12 mai, il a été convenu que l’Accord final sera intégré à la Constitution, une fois signé, afin d’asseoir sa pérennité et sa légitimité. Il sera également déposé en Suisse, garant des Conventions de Genève, ce qui donnera aux négociations une légitimité vis-à-vis du Droit international humanitaire. Enfin, une déclaration du président colombien sera faite devant le Conseil de sécurité de l’ONU.

Accord sur les enfants soldats
Enfants_soldatsLe 15 mai, un accord a été rendu public concernant la sortie des mineurs présents dans les rangs des FARC. Un programme spécifique de prise en charge sera proposé, reconnaissant leurs droits et donnant la priorité à la réintégration dans leur famille ou leur communauté. Ceux qui seront accusés de crimes seront renvoyés devant le système de justice spécifique prévu au point 4 des accords. Les FARC, quant à eux, avaient déjà indiqué le 10 février dernier mettre fin au recrutement de mineurs. Selon les estimations officielles, plus de 11.000 enfants ont été recrutés depuis 1975 par les FARC.

L’inquiétant phénomène paramilitaire
parmilitaireDepuis plusieurs mois déjà, d’autres acteurs armés illégaux s’affrontent pour reprendre le contrôle des territoires, que cela soit l’autre guerilla, l’ELN, les paramilitaires ou les trafiquants en tous genres. L’inquiétude la plus grande vient de la démonstration de force, au grand jour, du Clan Usuga, un groupe issu des anciens paramilitaires (AUC). Ces hommes ont organisé un « paro armado » dans 36 villes (que l’on pourrait traduire par « blocus armé») le 31 mars, paralysant les populations et les personnes, en promettant de terribles représailles en cas d’opposition. L’objectif était de semer la terreur, de prendre le contrôle des territoires et de défier l’État. Ce dernier, impuissant d’abord, a réagi ensuite en menant des opérations d’envergure. Malgré quelques arrestations, le phénomène tend à s’étendre, à s’organiser et à menacer une paix réelle.

Le processus avec l’ELN au point mort
ELNEn préparation depuis longtemps, l’officialisation du début du processus de paix avec la seconde guérilla tarde à venir. D’autant que la perspective d’un débouché politique avec les FARC peut tendre à faire monter les enchères pour l’autre guérilla, en « récupérant » le statut de groupe révolutionnaire n°1 qui serait du coup laissé vacant.. L’ELN joue en même temps la carte du dialogue et celle des actions belliqueuses, pour étendre son influence sur certains territoires. Les deux parties – ELN et État – se rejettent la faute, notamment sur des points de l’agenda préparatoire. S’il est difficile de prévoir les conséquences de ce contretemps, une chose est sûre, c’est que la paix éventuellement signée avec les FARC ne serait, dans ces conditions et en tenant compte de la progression des paramilitaires, qu’une paix incomplète.

Vous pouvez recevoir la lettre info de Réseau France Colombie Solidarité en allant sur leur site.
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