Commémorations de mai 2025 : 4 regards chrétiens sur l’esclavage

Le 10 mai commémore les mémoires de la traite, de l’esclavage et de leur abolition. Quatre célébrations eucharistiques ont marqué cette date.
Messe de commémoration de l’abolition de l’esclavage, le 4 mai 2025 à l’église Saint Jean Bosco, Meaux
Dans son homélie, le Père Olivier Vatar s’est interrogé sur les multiples facettes de l’esclavage et leurs terribles atteintes à la liberté individuelle, les esclaves n’étant pas considérés comme des humains mais comme des outils de travail, achetés et vendus telles des marchandises. Toutes les révolutions et réformes n’amélioreront que partiellement la situation du monde, tant que le cœur de l’homme ne changera pas et une seule force est capable de le faire : une relation d’amour inspirée par l’action de Dieu. La résistance de notre monde à cette ouverture explique en grande partie la dégradation des valeurs morales. L’état d’esprit qui mène notre monde est à l’opposé de celui de Dieu, révélé dans sa Parole par les prophètes, Jésus-Christ, les apôtres. Quand on substitue à l’acte autoritaire la relation d’amour, quand on se met en phase avec son interlocuteur en se mettant dans une position d’humilité, quand on valorise le bien qui se trouve en l’autre, quand on parle de grâce et de paix, en référence à celles que l’on reçoit de Dieu, alors la puissance de Dieu peut affranchir l’homme de son désir de pouvoir et de domination et restaurer le lien d’amour entre les enfants de Dieu.
Messe en mémoire des victimes de l’esclavage, le 11 mai 2025 à l’église Notre Dame de Montceau- les-Mines
Dans son homélie, le célébrant rappelle les trois chemins (écouter, connaître, suivre) que Jésus nous propose pour être Ses disciples et nous libérer de toutes les formes d’esclavage. « Mes brebis écoutent ma voix » : celui qui n’écoute pas la Parole ne peut pénétrer en profondeur le mystère de Dieu. « Mes brebis me connaissent » : il s’agit non pas de la connaissance historique du fils de Joseph et Marie qui a grandi à Nazareth, mais de la connaissance mystique de Jésus, celle qui nous révèle notre véritable identité chrétienne. « Mes brebis me suivent » : de même que Jésus se laisse guider par l’Esprit de Dieu, nous devons nous laisser guider par Jésus, Lui qui possède tout ce qu’il faut pour aller jusqu’au bout du chemin de Dieu sans faiblir. Ecouter Jésus, Le connaître, Le suivre, tels sont les trois chemins que Dieu nous propose pour briser les chaînes de tous les esclavages.
Messe en mémoire des victimes de l’esclavage colonial, le 23 mai 2025 à la Basilique Cathédrale de Saint Denis
Dans son homélie, le Père Jean-Christophe Helbecque rappelle l’histoire de Moïse se retrouvant seul dans le désert, loin de sa terre natale. Au milieu d’un buisson en feu, Dieu se révèle à Moïse et lui dit : « J’ai vu la souffrance de mon peuple qui est en Égypte et j’ai entendu les cris qu’il pousse face à ses oppresseurs, car je connais ses douleurs ». Dans la langue grecque, le mot « commandement » est le même que « commencement ». Le commandement n’est pas celui de la personne qui commande et se place au-dessus des autres, mais c’est celui qui est au commencement, se plaçant au pied du prochain, à l’exemple de Jésus lavant les pieds de ses disciples. Cette image est celle que l’on retrouve avec les immenses piliers de la basilique qui n’ont pu s’élever haut sous les voûtes que parce que des fondations solides, bâties à leur pied, les soutenaient. Aujourd’hui encore, l’oppression, le mal, la division, le manque de respect… sont là, faisant que la vie de l’homme n’est pas considérée. Mais Dieu est présent au cœur de l’oppression, nous appelant comme Il l’a fait pour Moïse, afin de nous donner Sa vie et nous rendre libres.
Messe en hommage à nos aïeux morts en esclavage, le 24 mai 2025 à la cathédrale Notre-Dame de Créteil
Dans son homélie, le diacre haïtien Louckenson Troissous demande de nous rappeler tout ce que nous devons à nos aïeux esclaves, eux qui nous ont permis d’accéder à la liberté dont nous jouissons aujourd’hui. Il nous faut faire mémoire de nos ancêtres morts en esclavage, une mémoire vivante, sanctifiée par la foi et rendue féconde par l’espérance. Il nous faut rendre grâce pour l’héritage moral et spirituel qu’ils nous ont légué, fruit d’une foi indéfectible. Il nous faut nous souvenir de ces vies brisées, arrachées à leur terre natale, enfermées dans les fers de l’injustice et pourtant toujours soutenues par la lumière de la foi gisant au plus profond de leur âme. Part essentielle de l’héritage sacrée de l’humanité, interpellation adressée à chaque conscience, cette mémoire nous touche, car elle nous dit la capacité de résister à l’injustice et à espérer envers et contre tout. Les cœurs de nos aïeux étaient enchaînés, mais leurs âmes restaient tournées vers le ciel, s’exprimant à travers des chants d’espérance. Leur mémoire est un appel à la fraternité et à la justice et une lumière pour tous ceux qui aiment la liberté et la paix. Ils ne sont pas morts en vain, car le Dieu de justice a accueilli leur sacrifice et rien ne s’est perdu de ce qu’ils ont semé dans l’amour et la foi. À travers eux, Jésus nous laisse sa paix, force intérieure qui nous pousse à agir avec force et amour, à raviver notre foi, à nous convertir et à vivre la solidarité en libérant nos cœurs de la division. Nantis de l’héritage précieux de foi et de liberté légué par nos ancêtres, nous ne devons jamais cesser de les porter dans notre prière, eux qui ont donné leur vie pour que nous marchions libres et unis dans l’amour et la fraternité.
Pascal Gbikpi, coordonnateur de l’aumônerie Antilles-Guyane