Témoignage de vie sur l’Eucharistie et la semaine missionnaire mondiale

Témoignage de vie sur l’Eucharistie et la Semaine missionnaire mondiale avec Mgr Martin Waingue Bani, évêque de Doba (Tchad).

Quelle place l’eucharistie occupe dans la vie des communautés dont vous desservez ?

Pour les communautés chrétiennes de nos paroisses, souvent éloignées les unes des autres, la participation à l’eucharistie, surtout celle dominicale, est le plus grand événement de la semaine. Là où il n’y a qu’un seul prêtre pour desservir 40 à 80 communautés, les fidèles se réunissent souvent le dimanche pour faire une célébration de la Parole. Il n’y a qu’une ou deux messes dominicales par an dans une communauté ; et c’est souvent une messe dite « messe de secteur » car elle regroupe les fidèles de 5 à 10 villages. La communauté qui accueille la célébration eucharistique met tout son honneur à accueillir (loger et nourrir) le prêtre et les fidèles d’autres villages qui viennent prendre part à la messe, en faisant parfois des dizaines de kilomètres à pieds pour s’y rendre afin de pouvoir communier et calmer, comme disent certains, leur « faim de la messe ». L’eucharistie est perçue donc chez nous comme un jour de fête, de retrouvailles entre les fidèles et de partage. Elle renforce véritablement le lien de fraternité et de solidarité entre les fidèles et les communautés.

Comment le texte des disciples d’Emmaüs raisonne dans le contexte de la vie au Tchad aujourd’hui ?

Les disciples d’Emmaüs étaient bouleversés par la mort de Jésus sur la croix, une mort qui a été ressentie comme un échec politique pour eux qui espéraient qu’il était celui qui allait libérer le peuple d’Israël du joug du pouvoir romain. Voilà qu’il est mort et l’occupant romain est toujours là en place et donc la soumission continue. Incapables de trouver un sens aux événements du Vendredi Saint, ils sont profondément déçus et désemparées. C’est alors la dé-mission. Comment ne pas voir en ces disciples, nos populations qui attendent depuis des années un modèle de gouvernance qui leur apporterait le bonheur et changerait leur situation de misère et améliorerait leurs conditions de vie. Comme les disciples d’Emmaüs, nombreux sont ceux et celles, surtout les jeunes qui sont découragés et désemparés de la situation actuelle dans laquelle ils vivent, une situation marquée par l’incertitude de la transition politique et institutionnelle, la violence, l’insécurité, le chômage, la cherté de la vie, la baisse de pouvoir d’achat, le dérèglement climatique, etc. D’autres ne croient plus aux promesses des gouvernants de remettre le pays sur le chemin de la démocratie et du développement.

Mais nous nous rappelons aussi que c’est dans cette même situation de découragement et de tristesse que Jésus ressuscité a rejoint les disciples d’Emmaüs sur le chemin de la dé-mission pour les rassurer de sa présence au milieu d’eux en leur réchauffant le cœur avec la parole d’espérance et en leur ouvrant les yeux pour le reconnaitre quand il a rompu pour eux le pain. Sûrs de sa présence et de son amour, ils expriment leur profond désir à cet inconnu qui est devenu leur hôte et leur compagnon : « Reste avec nous, car le soir approche et déjà le jour baisse. » C’est alors qu’ils abandonneront petit à petit le chemin de la dé-mission pour retrouver le chemin de la mission des témoins du ressuscité.

Dans la situation de crise économique, sociale et sécuritaire sans précédent de notre pays, le sacerdoce et la vie religieuse demeurent une icône d’espérance pour les populations qui vivent dans le désarroi et le désespoir. Elles ont besoin des témoins du Christ ressuscité que sont les prêtres, religieux et religieuse pour les nourrir de la parole de Dieu et du pain eucharistique, pour témoigner de la présence de Dieu et de son amour auprès d’elles. Puisque la vocation à la vie sacerdotale et religieuse est « grâce et mission », il faut continuer à la promouvoir dans le contexte de notre société actuelle « avec ses blessures et ses espoirs, ses défis, ses succès ».

Le manque de prêtres, religieux et religieuses pour répondre aux besoins pastoraux des communautés chrétiennes et pour témoigner de l’amour de Dieu à travers les œuvres caritatives et de promotion humaine, est une raison suffisante pour célébrer la journée mondiale des missions dans tous nos diocèses. Les communautés chrétiennes sont ainsi sensibilisées à prier pour toutes les formes des vocations et à soutenir par leur offrandes la mission universelle.

Mgr Martin Waingue Bani, évêque de Doba (Tchad).

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